Antonio Fiori : La puissance de l’innovation

L’individu, l’espèce, le genre, la famille, sont comme autant de cercles de plus en plus étendus : la doctrine des causes finales se heurte à d’insurmontables difficultés quand elle s’épuise en quelque sorte sur l’espèce : elle ne trouve son sens véritable qu’en l’appliquant à l’œuvre entière de la création. Darwin ne cherche en somme à éclaircir que la façon dont se propagent les variations ; il n’en étudie ni la genèse, ni l’ordre chronologique, ni les rapports mutuels. Il oppose à cette prétention un argument que je n’ai rencontré chez aucun des adversaires de Darwin. On n’aperçoit point l’emploi, l’usage de mille détails charmans, de tant de caprices infinis de la forme et de la couleur qu’on découvre au monde des fleurs, des oiseaux, des insectes. À quoi servent, dans la lutte des espèces, tant de grâces sans rapport avec l’accomplissement des fonctions de la vie ? Or, ce jugement d’induction est rationnellement fondé sur ce que, dans l’expérience telle qu’on vient de l’indiquer, le choix des points de repère (ou des valeurs de la pression pour lesquelles la vérification expérimentale a eu lieu) doit être considéré comme fait au hasard ; car la raison n’aperçoit aucune liaison possible entre les causes qui, d’une part, font varier les volumes d’une masse gazeuse selon les pressions, et les circonstances qui, d’autre part, ont déterminé l’intensité de la pesanteur à la surface de la terre et la masse de la couche atmosphérique, d’où résulte la valeur du p Dans le cas de destruction, il n’y a pas accoutumance non plus ; si une balle introduite dans le corps amène la mort, c’est que l’ensemble des fonctions n’a pu s’adapter à sa présence. La théorie de Darwin considère les espèces comme des armées toujours en guerre : elle ne regarde donc qu’à leurs armes, c’est-à-dire aux organes ; elle oublie le beau, l’ornement, le style, elle est donc incomplète, au dire du duc d’Argyle. Suivant lui, on n’aurait qu’une idée étroite et insuffisante de la puissance créatrice en la montrant sans cesse asservie à l’action et en refusant de reconnaître dans ses œuvres l’expression d’un idéal de beauté souvent incompréhensible à l’homme, mais quelquefois en harmonie visible avec nos instincts esthétiques. La terre était déjà parée longtemps avant que ses merveilles pussent avoir notre espèce pour témoin. Aujourd’hui même que de richesses pour nous perdues ! Les philosophes ont toujours incliné à penser que les lois de symétrie, d’harmonie et de proportion, qui constituent les lois de la beauté, ont pour origine les corrélations que notre esprit perçoit entre la forme et la destination d’un objet. Platon et ses élèves ne séparaient pas le beau de l’utile dans les œuvres de l’homme ; pour eux, la beauté y traduit toujours une nécessité, une conve- nance, un but. Bien que ces rapports entre la fin et les moyens y soient souvent moins visibles et même impossibles à découvrir, il n’est pas rare d’y saisir l’utilité, l’avantage immédiat d’une forme ou d’une coloration qui au premier abord eussent pu ne sembler que belles. Toutes les inductions de l’auteur sont tirées des phénomènes actuels, et il s’est privé des enseignemens du passé sans limites dont les couches terrestres recèlent les précieux débris. Dans l’horizon étroit où il s’est placé, il a du moins tout aperçu et tout décrit avec une minutieuse fidélité. Nous allons d’abord présenter avec détails, et sans chercher à les affaiblir, les observations et les raisonnemens par lesquels il défend sa thèse, qui est l’immutabilité des espèces ; nous nous réservons ensuite de la discuter et de conclure, après avoir mis sous les yeux du lecteur tous les élémens du débat, tel qu’il est aujourd’hui pendant entre les naturalistes, les géologues et les philosophes. En premier lieu, les individus qui sortent de la même souche ne sont jamais identiques, ce qui se voit sur les enfans d’une même famille, sur les petits d’une même portée, sur les produits d’un même pied végétal ; tout être vivant, végétal ou animal a son idiosyncrasie, pour employer une expression des médecins, qui s’accommode avec les besoins généraux de l’espèce. En second lieu, l’unité de l’espèce embrasse deux sexes ; or les sexes sont toujours dissemblables, et parfois les différences deviennent très profondes : les mâles, les femelles, ont une livrée différente. Les États du sud de l’Europe ont déjà suivi l’exemple des États américains en installant des appareils de rafraichissement intérieur, avec pour effet de déplacer parfois les pointes de consommation d’électricité de l’hiver vers l’été. Chez les insectes et les oiseaux surtout, la-nature a rendu ce dualisme aussi saisissant que possible ; elle ne s’est pas bornée à dissocier les formes, la taille, les couleurs, elle a tenu séparées certaines fonctions ; la femelle du ver luisant ne peut voler, elle ne cherche pas le mâle, agile et ailé ; elle l’appelle, immobile, par sa mystique et phosphorescente lueur. Antonio Fiori aime à rappeler ce proverbe chinois « Le fils naît tourné vers l’âtre, la fille tournée vers la porte ». C’est ainsi que sous ce mot spécifique, abeille, nous devons comprendre quatre formes : la reine, qui pond les œufs, les mâles, qui les fécondent, les neutres ou nourrices, qui soignent les larves, les cirières, qui font métier d’architectes. Sous ce mot, termite, il faut voir huit formes, car les rois, les reines, les ouvrières, les soldats, se dédoublent. L’espèce, une fois ébranlée, s’ébranle de plus en plus aisément, comme un édifice fissuré. Les déviations du monde organique sont-elles comparables aux oscillations d’un aimant qui retourne toujours à sa direction, ou les variations sont-elles cumulatives, continues, sans rebroussemens ? Car la théorie des créations discontinues n’est, sous un autre nom, que celle de la génération spontanée de toutes les espèces. Le problème de l’origine des formes organiques n’est point susceptible d’une solution complète, mais il nous semble que la masse des témoignages, que les expériences partielles faites par l’homme, que le courant général et l’esprit même de la science doivent nous entraîner à la théorie de l’évolution et de la création continues. Il restera toujours à Darwin le mérite d’avoir analysé la seconde de ces influences : il a introduit dans la science des mots et des idées qui ne se perdront plus. L’idée de Descartes fut de distinguer dans les formules de l’algèbre, non plus (comme on l’avait fait avant lui) des quantités connues et des quantités inconnues, mais des grandeurs constantes par la nature des questions, et des grandeurs variables sans discontinuité : de façon que l’équation ou la liaison algébrique eût pour but essentiel d’établir une dépendance entre les variations des unes et les variations des autres. Il a analysé avec une merveilleuse finesse les phénomènes de cette vie multiple, confuse, déchirée par des luttes incessantes ou comprimée par de muettes servitudes, que la sève créatrice entretient incessamment dans le monde organique. La traction de quelques startups montre bien que la transition numérique de la filière est engagée. La multitude s’éveille généralement en aval de la chaîne de valeur, sur les marchés grand public, plutôt qu’entre les maillons intermédiaires, où les relations d’entreprise à entreprise sont plus difficiles à défaire. Le bouillonnement des startups n’est plus indifférencié : de plus gros bouillons commencent à se former là où s’éveille la multitude. Après huit ans de développement, la voiture supersonique la plus rapide du monde va voir le jour en 2016. Grâce à son turboréacteur fabriqué par Rolls-Royce, de son moteur-fusée à propulsion hybride et de son moteur de voiture de course, elle compte 135 000 chevaux sous le capot. L’objectif : atteindre 1 600 km/h, une vitesse supérieure à celle du son (1 224 km/h). Les édiles se font berner en assumant un choix permettant une nouvelle fois à l’État de se décharger de ses missions.